L’esclavage a été pratiqué par toutes les nations depuis que l’homme est sur Terre. Ceci est un fait indiscutable et la civilisation arabo-musulmane (1) n’échappa pas à cette réalité.
Les raisons qui nous ont poussé à rédiger ces lignes sur la question épineuse de « l’esclavage » sont diverses et ne datent pas d’aujourd’hui ; depuis un certain temps nous constatons en France des dérapages médiatiques contrôlés (2) souvent orchestrés par des « pseudos-intellectuels » dont les intentions sont douteuses et qui parfois sont même issus de l’islam, se présentant en plus avec l’étiquette de « penseurs musulmans ». Qu’ils soient musulmans ou non importe peu, ceci étant dit, ces individus répandent des contrevérités et des diffamations qui ne seraient être passées sous silence ; elles nous obligent aujourd’hui à sortir de notre réserve pour dénoncer encore une fois l’acharnement médiatique contre l’islam qui en tant que religion de paix et de fraternité n’est en rien responsable ni de près ni de loin de l’écart de comportement de certains de ses fidèles ou de ce que semble lui reprocher à tort tous ceux qui l’accusent aujourd’hui d’idéologie esclavagiste.
Quelles sont donc vraiment les intentions de ceux qui accusent les musulmans de racistes et d’esclavagistes ? L’islam produit-il réellement de l’esclavage ou s’agit-il encore d’une énième machination dont seul l’Occident moderne a le secret, et dont le but non déclaré est de dénaturer l’image de la dernière révélation du Ciel ? Ou encore, peut-on réellement comparer du point de vue de l’histoire ce que fut la traite négrière en Occident et l’esclavage en terre d’islam ? Des questions qui nous obligent à traiter le sujet à partir du point de vue religieux comme à notre habitude et en deux chroniques distinctes, afin d’être le plus complet possible et de dissiper une fois pour toute, les nuances qui planent encore sur la question de l’esclave en Occident et en terre d’islam. Ainsi la première partie traitera le sujet de l’esclavage en Occident chrétien et la deuxième qui paraîtra le mois prochain fera de même avec l’Islam.
L’esclavage en Occident :
Le mot « esclavage » vient du latin médiéval « sclavus » lui-même déformation du mot latin classique « slavus » qui désigne les slaves. Il est une vérité connue de tous que l’Occident a pratiqué l’esclavage depuis l’antiquité, en passant par la période romaine (d'avant et après le Christianisme) et jusqu’à l’apparition des premiers mouvements philanthropes qui l’abolirent définitivement au 19ième siècle. Il est aussi admit par la majorité que la « traite négrière » pratiquée en Occident concernait essentiellement des Noirs qui furent capturés en Afrique, dans le cadre d’expéditions bien exécutées, arrachés à leurs terres d’origine et déportés comme du véritable bétail vers l’Europe pour les raisons que tout le monde connaît.
Entreprise véritablement fleurissante, l’institution de l’esclavage en Occident subsista tout au long du Moyen Âge, où Venise fut par exemple l’une des escales maritimes les plus incontournables ; fréquentée par des marchands d’esclaves qui pouvaient acheter et vendre à leur guise hommes et femmes africains enchaînés et exposés dans des cages au marché de la ville, après avoir bravés dans des conditions animales, la mort et les affres d’un voyage périlleux.
Les survivants à ce voyage « sans retour » étaient donc échangés au terme de leur destination comme une vulgaire marchandise pour dévouer le restant de leur existence corps et âme à l’homme blanc, qui pouvait à son tour soit les revendre, les corriger en cas de désobéissance ou même mettre fin à leur vie dans certains cas (3).
Plus tard au 16ième siècle ce fut le tour des espagnols et des portugais d’imiter leurs prédécesseurs et d’initier à leur tour avec la complicité de la couronne catholique (4) et malgré la condamnation du pape Paul III ce que l’histoire a retenu sous le nom de « commerce triangulaire », légitimant leur action par un manque de main d’oeuvre élémentaire dans « le nouveau monde » qu’ils venaient de conquérir quelque temps auparavant.
C'est plus tard lors du Congrès de Vienne en 1815 qu'on parla pour la première fois de l'abolition législative de l'esclavage en Europe. La déclaration signée par huit nations, dont l'Angleterre, la Russie et l'Espagne, stipulait : « la traite répugne aux principes généraux de la morale et de l'humanité... que l'opinion publique dans tous les états civilisés en réclame hautement la prompte suppression, que les plénipotentiaires des puissances européennes, réunis en congrès déclarent que le désir de leurs souverains est de mettre un terme au fléau qui désole l'Afrique, avilit l'Europe et afflige l'humanité. »
Mais malgré les lois et les bonnes intentions des gouvernements européens, l'esclavage et la traite des noirs ne cessa pas pour autant et dura encore de longues années. En France, ce n'est que le 4 mars 1848 que l'esclavage fut officiellement aboli par la loi et l’embarrassant Code noir déclaré caduc. La pratique de l’esclavage ne commença réellement à diminuer que sous l’impulsion de philosophes et d’hommes politiques qui furent particulièrement actifs à leur époque et qui exercèrent une vaste pression intellectuelle sur l’opinion publique pour la rallier définitivement à la cause abolitionniste. Ce fut ainsi en résumé comment la morale laïque triompha enfin de l’esclavage en Europe.
Au regard de l’histoire, n’est-il pas « anormal » que de constater que l’abolition de l’esclavage en Occident s’est accomplit par des philosophes et des moralistes athées (5) et non par des hommes de religion ? Autrement dit, comment de telles pratiques barbares furent-elles infligées pendant des siècles à des êtres humains en « Occident chrétien », alors que les instances religieuses de l’époque se devaient d’exercer encore une certaine influence sur les gens qui, à défaut d’être traduite en actes, aurait au moins dû être morale ?
Pour comprendre l’attitude ambiguë de l’église à certaines périodes de l’histoire et la passivité de la mentalité générale (6) de cette époque face au drame de l’esclavage, il faut remonter aux origines judéo-chrétiennes de l’Occident et plus précisément aux sources bibliques dont personne ne conteste aujourd’hui le fait qu’elles furent à l’origine de sa civilisation. Ces dernières l’on sait maintenant, subirent dans leur corpus une corruption doctrinale et dogmatique par la main d’hommes d'Eglise peu scrupuleux (7) qui instrumentalisèrent ainsi leur propre religion en détournant ses écritures saintes pour asseoir leur pouvoir, concrétiser leur intérêts personnels ou pour justifier une croyance de l'époque.
C’est ainsi que l’esclavage fut légitimé par l’ancien testament, qui révèle dans un des passages polémiques de la Genèse que Cham (père de Canaan), l’un des fils de Noé, est maudit par ce dernier pour ne pas avoir couvert sa nudité alors que ce dernier était ivre et assoupi dans sa tente : « 25. Et il dit : Maudit soit Canaan ! Qu'il soit pour ses frères le dernier des esclaves ! 26. Il dit aussi : Béni soit YHWH, le Dieu de Sem, et que Canaan soit son esclave ! 27. Qu'Elohim agrandisse Japhet, qu'il habite dans les tentes de Sem, et que Canaan soit son esclave ! »
Au-delà de l'illogisme que révèle se verset et de manière globale, l'altération des « écritures saintes » par les théologiens de la Bible est belle est bien une réalité qui se constate dans de nombreux passages du livre sacré des chrétiens. Elle permit par la suite à certains esprits malveillants comme le pape Nicola V pour ne cité que ce dernier, d’exercer une exégèse « tendancieuse » des écrits religieux qui allait bientôt légitimer l'esclavage en Occident en associant le « critère racial » à la foi religieuse. Ce qui fut incontestablement une innovation « périlleuse » à caractère dangereux du christianisme, puisque aucune religion ou tradition sacrée n’avait fait pareil, ni auparavant ni après. Il est à signaler aussi que cette corruption du texte n’est pas un cas isolé dans la Bible car il en est de même pour ce qui est du « racisme » qui prend son origine aussi dans la Bible pour asseoir son dogme et notamment le mythe de la supériorité de la race de « Sem » sur les autres. Si le racisme ne fait pas l’objet de notre développement aujourd’hui nous pourrions dire au passage qu’il constitua à travers l’histoire une étape incontournable pour la concrétisation de l’idéologie esclavagiste en Occident.
De façon générale, l’inefficacité et l’impuissance de l’église à irradier l’esclavage en Occident depuis le "moyen-âge", traduit ostensiblement l’imperfection de son modèle religieux et social. Ce même modèle qui faisait jadis l'unanimité aux débuts du christianisme, c'est détérioré petit à petit au fil du temps, en conséquence du remaniement sinistre de ses textes fondateurs au fur et à mesure de l'histoire, ce qui a de la sorte profondément altéré et travesti son message originel ; Il est avéré que quand le message religieux devient ambigu ou quand la religion renie progressivement ses idéaux et ne se mêle plus aux grands combats de l'humanité, cette dernière perd systématiquement toute son influence spirituelle et sa crédibilité aux yeux de ses fidèles; qui pris par la confusion se désolidarisent de ses valeurs et de sa morale, pour finir par se détacher d’elle et ne plus se référer à ses enseignements. C’est ainsi que la morale laïque considérée par les occidentaux comme étant une « évolution » naturelle et positive (8) prit le dessus sur la morale religieuse qui elle fut reléguée au deuxième plan, pour ne pas dire devenue caduc.
Si le christianisme comme nous venons de le dire eu une certaine responsabilité dans la persistance de l’esclavage en Occident, il n’en demeure pas moins qu’il ne fut pas le seul coupable; l’Europe médiévale fut aussi fortement influencée, par la civilisation grecque de l’antiquité, et notamment par ses philosophes les plus connus tel qu’Aristote, qui déclaré il y a plus de 2500 ans : « Il est donc manifeste qu'il y a des cas où par nature certains hommes sont libres et d'autres esclaves, et que pour ces derniers demeurer dans l'esclavage est à la fois bienfaisant et juste. » (La politique 1255 a 1)».
De nos jours, si tous les historiens s’accordent sur le caractère inhumain de la traite des Noirs, et que l’esclavage est désormais aboli en Occident, les stigmates et les blessures identitaires laissées par ce dernier ne sont pas prêtes de disparaître. Elles alimentent régulièrement de nos jours les tentions intercommunautaires dans les sociétés occidentales.
Enfin, nous pouvons dire pour conclure cette partie que si la pratique de l’esclavage ne fut pas l’exclusivité de l’Occident, en Orient les mêmes exactions furent aussi commises durant des siècles par les différentes civilisations qui s’y succédèrent à travers l’histoire. Cependant il convient de souligner que par son attitude générale vis-à-vis de l’esclavage, la civilisation musulmane à contrario de ce que l'on pense d'elle en Occident, fut véritablement une exception à cette règle au sens littéral du mot, comme nous allons l’exposer dans la chronique du mois prochain.
(1) Nous disons civilisation arabe car celle-ci fut en premier lieu le berceau de l’islam, religion qui s’étendit par la suite à d’autres civilisations qui bien qu’étant musulmanes et non arabe, pratiquèrent aussi l’esclavage.
(2) Il n’ y a qu’à voir le retentissement médiatique que eut en France la parution du livre « L’esclavage en Terre d’Islam » de M. Malek Chebel pour comprendre ce dont il s’agit.
(3) La législation qui régissait le droit des esclaves en Occident chrétien contrairement à l’islam comme nous allons le voir plus loin, ne fut en aucune mesure favorable à ces derniers. Le fameux code Noire promulgué en 1685 sous le règne de Louis XIV et mainte fois réédité par la suite témoigne de cet état de fait. Se référer aussi au livre de M. Edouard Biot « De l’abolition de l’esclavage ancien en Occident »
(4) Cette dernière ne condamna jamais la pratique de l’esclavage, elle le légitima même lorsqu'il s'agissait des [Taïnos] anthropophages.
(5) Les véritables intentions de ceux qui étaient derrière cette démarche sont loin d’être seulement humanistes, et mériteraient à elles seules un exposé à part.
(6) Il est inutile de signaler ici que cette dernière fut durant des siècles largement influencée par les différentes prises de position de l’église, normalement conformes à sa doctrine religieuse et ses « écritures saintes ». C’est ainsi qu’il convient de prendre en considération la très controversée phrase de Montesquieu quant à l’esclavage, qui elle même reflétait largement la mentalité de l’époque : « On ne peut se mettre dans l’esprit que Dieu, qui est un être très sage, ait mis une âme, surtout une âme bonne, dans un corps tout noir »
(7) Se référer aux travaux de Simon Richard et son histoire critique du vieux Testament.
(8) Ce qui est bien sur faux, car une morale dénuée de verticalité et qui ne se rattache à aucune doctrine, même si elle donne l’illusion de changer les choses, en réalité se n’est que d’apparence qu’elle le fait, car au fond s’il n’est pas combattu à la racine le « mal » persistera toujours.
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Fathia 09 novembre 2008 01:29:41 | Selem, |
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[N.D.R] 09 novembre 2008 22:04:52 | Fathia le terme "arabo-musulmane" pointe ici le concept de « civilisation » et non celui de « religion », comme l’indique la note (1) en bas de page. Il y a bien eut au départ une civilisation musulmane qui s’articula autour de la religion musulmane mais dont la composante sociétale et culturelle, bien qu’elle fut arabe à l’origine, devint rapidement multi-ethnique. Par abus de langage on utilise parfois dans le langage occidental le terme « arabo-musulmane » qui comme l’explique la deuxième partie de la chronique ne désigne pas que la civilisation arabe mais toute celle issue de l’islam. |
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aissa 20 août 2010 04:15:55 | Je vous pose la question suivante. Que signifie pour vous l'adjectif "Ma malekat imanoukoum" et qu'on trouve dans le coran |
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natation 22 février 2014 12:46:40 | difference entre abd et abid |
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