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    Le blocage mental du Progrès continuel

    Depuis la Renaissance, la civilisation occidentale moderne s’est construite dans la croyance en un Progrès perpétuel. L’ensemble de nos systèmes sociaux et financiers a été conçu sur ces prémices longtemps considérés comme un Dogme absolu : croissance démographique, croissance économique, croissance du niveau de vie. C’est ainsi que l’équilibre de nos systèmes de retraite et de santé repose sur l’hypothèse que nos enfants seront plus nombreux et plus riches que nous ; le capitalisme financier suppose une amélioration constante de la productivité et de la rentabilité ; le recours à l’endettement des Etats comme des ménages repose également sur l’espoir que nous serons plus riches demain qu’aujourd’hui ; nos enfants vivront plus longtemps, mieux, travailleront moins, consommeront plus, et pourront nous payer demain ce que nous ne pourrions nous permettre aujourd’hui... Ce blocage mental sur le progrès, et son corollaire, le refus de la régression, et même de la stagnation, se retrouve à tous les niveaux de notre société, de nos comportements individuels et collectifs : dépassement de records sportifs à tout prix, jusqu’au dopage médical et technologique le plus absurde (athlétisme, cyclisme, natation…) ; hantise de la vieillesse (surenchère de chirurgie esthétique et médicaments anti-vieillissement…) et de la mort (sujet tabou, occulté, dissimulé honteusement dans les hôpitaux et les maisons de retraites), jusque dans le fantasme de l’immortalité périodiquement entretenu par telle ou telle « découverte » scientifique ; plus généralement, refus de la perte, du ralentissement, du déclin, même cyclique et provisoire, que l’on retrouve indirectement dans la judiciarisation croissante de nos sociétés, où l’on porte plainte, recherche un coupable et exige indemnisation à tout va, et qui n’est pas autre chose que le refus du « risque d’accident » inhérent à la vie elle-même.

    Bien entendu ce blocage mental est en contradiction complet avec notre environnement, notre expérience et notre histoire, marqués par le cycle des saisons, la mort inéluctable des individus, et la perspective même de la disparition de notre espèce lorsque le Soleil mourant aura englouti notre bonne vieille Terre, ou que l’Univers se sera effondré sur lui-même ou dilaté jusqu’à la congélation ; la contradiction est devenue encore plus insupportable depuis qu’a été atteint, dépassé, le « point de rupture environnemental ». Ce grand écart schizophrène entre notre représentation erronée du monde et le monde « tel qu’il est » n’a cessé de s’accroître au fur et à mesure que nos prétentions et nos aspirations augmentaient ; et avec elle, bien sûr, la frustration, la déception, le mal de vivre si caractéristique de nos sociétés modernes perfusées d’anxiolytiques et d’antidépresseurs (dont les Français sont les premiers consommateurs). Car si, comme le disent les Bouddhistes, la seule forme réelle de bonheur n’est que l’absence de malheur, si par ailleurs on admet que notre sentiment de malheur est directement proportionnel à l’écart entre ce que nous avons et ce à quoi nous estimons avoir droit, on voit alors à quel point cette « idéologie du progrès » peut être génératrice de déception, de mal-être, de souffrance, finalement de violence...

    Finalement, l’idéologie du Progrès s’apparente à une fuite en avant qui ne fait illusion que tant que, effectivement, la croissance nous permet de vivre au dessus de nos moyens. Mais il suffit que les limites environnementales se rapprochent, puis soient dépassées, pour que tout s’enraye, se déséquilibre, se détraque, que la croissance ralentisse, voire s’inverse, que les bulles spéculatives éclatent, que les dettes publiques et privées explosent, que les systèmes de santé et de retraites deviennent des puits de déficit, que le pouvoir d’achat se tarisse, que le moral des ménages s’effondrent, que la peur et l’insécurité se généralisent, bref que des pans entiers de notre structure économique, sociale et mentale s’effondrent en entraînant les autres comme autant de dominos...

    La crise actuelle comme symptôme du blocage

    La crise financière actuelle est la plus parfaite illustration des conséquences dramatiques de ce blocage mental après que le point de rupture ait été dépassé : car, derrière tous ces produits financiers toxiques aux acronymes barbares, il faut bien se rappeler que, fondamentalement, la crise financière trouve son origine dans l’acharnement des USA à soutenir artificiellement, à crédit, la croissance chancelante de leur consommation intérieure, entraînant avec eux, dès lors que la limite était atteinte, leurs créanciers, c’est-à-dire le reste du monde. C’est donc bien la rupture d’une économie artificielle reposant sur une augmentation exponentielle du crédit pour maintenir sans cette l’appétit du consommateur, comme un drogué a sans cesse besoin d’une dose plus forte (selon les données bien connues de la Banque Fédérale américaine, il fallait en 1983 1,6 dollar de dette nouvelle pour obtenir 1 dollar de croissance du PIB ; en 1997, il en fallait 3,1, et en 2007, 6,9…) ; crise qui rappelle d’ailleurs celle qu’a connu le Japon dans les années 90, lorsque, après 30 ans de croissance soutenue, l’explosion de la bulle spéculative plongea les ménages dans une situation de dramatique surendettement, l’Etat essayant de maintenir à tout prix la croissance économique par une politique d’endettement public aussi massif que vain...

    La racine de la crise actuelle se trouve donc bien dans le refus d’accepter un nécessaire ralentissement de la croissance, sans même parler d’une stagnation ou d’une décroissance « vertueuse » : véritable blocage mental qui s’explique bien évidemment par cette croyance irrationnelle en la possibilité d’une croissance continuelle, et qui nous empêche aujourd’hui, individuellement et collectivement, de ralentir, de se restreindre, d’accepter de réviser à la baisse nos ambitions. Les américains ne sont pas les seuls à s’acharner envers et contre tout à maintenir un train de vie qu’ils ne peuvent plus se permettre. Les Européens aussi sont prêts à tout pour maintenir en vie des systèmes sociaux extrêmement coûteux mais insoutenables ; la Commission Européenne recommande une immigration massive pour financer les systèmes de retraite des « européens de souche » ; en réaction à la crise, au lieu de laisser pourrir comme des arbres morts les « cadavres bancaires », on les maintien en vie artificielle comme des zombies, toujours en émettant des montants astronomiques de nouveaux emprunts, c’est-à-dire en repoussant à la prochaine génération, au prochain gouvernement, au prochain président, la responsabilité d’éponger la dette, l’obligeant lui-même, plutôt que de prendre des mesures impopulaires et « anti-progressistes » d’austérité et d’économie, à emprunter pour payer la dette de plus en plus lourde (aujourd’hui en France les seuls intérêts de la dette engloutissent le produit de l’impôt sur le revenu), jusqu’à la faillite dont est aujourd’hui proche l’Angleterre.

    Le principe fondamental sur lequel repose notre système social et économique n’est tout simplement plus adapté au réel. Rationnellement, nous devrions changer d’idéologie et adopter une vision du monde qui tienne compte de ces nouvelles contraintes environnementales. Rationnellement, nous devrions adapter nos systèmes et nos procédures en fonction, et si nécessaire les remplacer par d’autres, qui ne spéculent plus sur un avenir radieux mais « internalisent », comme disent les économistes, les contraintes actuelles et les coûts futurs. Mais il y a tellement d’intérêts financiers, sociaux et politiques en jeu, d’ « effets cliquets » qui sont devenus autant de blocages mentaux et structurels, que nous paraissons incapables de poser convenablement et lucidement le problème, sans même parler de mettre en œuvre des mesures appropriées… Trop de lobbys, de syndicats, de groupes de pression émanant du monde économique, social ou politique, qui sont autant de points de blocage d’un système essoufflé que ceux qui en profitent encore parviennent, au prix de plus en plus de tension, à maintenir en vie artificielle… Finalement, malgré tous les indicateurs, malgré tous les avertissements des experts, nous continuons notre fuite en avant vers un bonheur de plus en plus radieux et illusoire, comme le Coyote de Tex Avery qui continue de courir dans le vide ; rien ne change dans un système économique et social en roue libre et dont personne ne comprend plus rien, si ce n’est qu’il ne peut survivre qu’en grandissant, en enflant, en s’autoconsommant comme une géante rouge, avant de s’effondrer sur lui-même sous l’action de sa propre gravité...

    Une nouvelle idéologie, de nouveaux réactionnaires ?

    L’humanité est entrée dans l’ère du Progrès le jours ou les gens ont commencé à se dire que leur enfants vivraient mieux qu’eux. L’ère du Progrès s’est achevée le jour où les gens ont commencé à se dire que leurs enfants vivraient moins bien qu’eux. Ce basculement entre une ère de progrès et une ère de décadence est de plus en plus perceptible aujourd’hui : un sondage du Nouvel Observateur, réalisé lors de la campagne présidentielle de 2007 (mais il me semble que des sondages identiques commençaient à livrer des résultats similaires dès la fin des années 90), en est à mon sens particulièrement révélatrice : si 66% des Français estiment mieux vivre que leurs parents, 56% pensent que leurs enfants vivront moins bien qu’eux...

    L’idéologie du Progrès s’est imposée aux croyances séculaires comme la sélection naturelle conduit des espèces mieux adaptées à s’imposer à d’autres : parce que ses adeptes, débarrassés des freins moraux de leurs contemporains, se sont montrés moins inhibés, plus entrepreneurs, plus inventifs, en un mot plus efficace, et ce sont imposés naturellement. Cette idéologie du Progrès s’est installée aussi facilement dans l’inconscient collectif parce qu’elle semble cohérente avec ce que l’homme de la rue observe autour de lui (les automobiles, les avions, le téléphone, les vaccins, autant de miracles qui prouvent l’existence du Dieu Progrès comme la multiplication des pains et la marche sur l’eau prouvait celle du Dieu d’Abraham…) ; elle s’y ancre avec d’autant plus de facilité qu’elle flatte la nature humaine en lui promettant de subvenir à ses plus bas instincts : toujours plus de nourriture et de sexe, pour tous et sans effort ; elle en sera d’autant plus difficile à expurger.

    Lorsque l’Idéologie du Progrès triomphait, le Conservatisme faisait figure de résistance héroïque. Aujourd’hui, il n’est même plus question de « rester en l’état » : on parle de « « décroissance durable », certains écologistes extrémistes prônent même la disparition de l’Homme… Sans tomber dans ces extrêmes, il est certain aujourd’hui que l’idéologie du Progrès perpétuel est morte. Elle doit être remplacée par une autre idéologie, une autre représentation du monde pour accompagner ce mouvement de reflux, ce retour à l’équilibre. On peut souhaiter que cette nouvelle représentation repose sur un retour aux cycles et au respect des contraintes naturelles, une sorte de religion « chtonienne » qui ne tomberait pas dans le paganisme aux relents néo-nazis, ni dans le new age sous acide ; une acceptation sereine de nos limites, que pourraient nous inspirer la méditation des philosophies orientales comme le Bouddhisme ou le Taoïsme… Une représentation du monde radicalement différente, qui nous fasse accepter l’idée qu’être moins nombreux, vivre moins longtemps et plus péniblement n’est pas impossible, est même nécessaire, et n’est en tout cas pas incompatible avec le bien-être et la plénitude d’une existence sereine ; qui nous permette d’arrêter de croire que la science et la technologie, comme par miracle, vont nous permettre de résoudre nos problèmes sans effort (éolien, solaire, appareil pour perdre du poids en dormant…) ; qui nous fasse accepter le monde et l’humanité tels qu’ils sont, et non tels que nous voudrions qu’ils soient…

    « La tradition et le progrès sont deux grands ennemis du genre humain. », disait Paul Valéry. De même que le salut ne doit plus être attendu d’un illusoire « progrès », il ne doit pas non plus être recherché dans un retour aux « vieilles croyances », une nostalgie d’un « passé idéalisé » tout aussi illusoire. Les Anciens voyaient la perfection dans le passé ; les Modernes dans le futur ; aujourd’hui, il est plus qu’essentiel de se débarrasser de ces constructions mentales, de voir le présent tel qu’il est, et de prendre les décisions qui s’imposent raisonnablement en toute lucidité. C’est bien de ces nouveaux « réactionnaires » que viendra le salut de notre espèce, car, comme l’écrit magnifiquement Nicolás Gómez Dávila dans Le réactionnaire authentique, « Si le progressiste se tourne vers l’avenir, et le conservateur vers le passé, le réactionnaire ne cherche ni dans l’histoire d’hier ni dans l’histoire de demain le paradigme de ses aspirations. Le réactionnaire n’acclame pas ce que doit apporter la prochaine aube, ni ne s’accroche aux ombres ultimes de la nuit. Sa demeure s’élève dans cet espace lumineux où les essences l’interpellent par leur présence immortelle. »

    L’idéologie d’une civilisation n’est que la représentation du monde de son élite dirigeante. Un changement d’idéologie doit donc passer par un changement d’hommes. L’histoire montre que les hommes ne changent pas : ils sont simplement remplacés par d’autres, selon les lois de la sélection naturelle qui veut que les individus les mieux adaptés survivent et remplacent peu à peu, sans violence, les individus autrefois majoritaires mais désormais moins adaptés, jusqu’à former une nouvelle espèce. Espérons simplement qu’une nouvelle élite mieux adaptée à notre environnement fragilisé parviendra à prendre dans les décennies à venir la direction de notre espèce ; espérons que cela se produise avant que nous n’ayons irrémédiablement détruit notre planète...

    Auteur: Agoravox.fr
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    Dernière mise à jour : 01/08/2014 - Nombre visiteurs : 8139925
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